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Qu'est-ce que l'exploitation sexuelle ?

L’exploitation sexuelle a plusieurs visages. Il s'agit d'un phénomène qui peut se manifester sous plusieurs formes et dans plusieurs contextes. C'est entre autres pour cette raison qu'encore aujourd’hui tous ne s’entendent pas sur sa définition. Il y a plusieurs lois qui permettent de baliser, sur le plan légal, tout ce qui entoure le phénomène de l’exploitation sexuelle des mineurs. Par contre, ces lois apportent souvent peu de précisions quant à ce qui constitue ou non une situation d'exploitation sexuelle.

Règle générale, en plus de l'âge, il y a deux éléments à considérer afin de déterminer la présence d'une situation d'exploitation sexuelle d'une personne mineure : 

  • La nature sexuelle des actes : il peut s'agir, par exemple, d'une danse érotique, d'une relation sexuelle ou de production de matériel à caractère sexuel (photos, vidéos, etc.).
  • La présence d’une situation d’exploitation : l'exploitation s’illustre par diverses formes d’abus, de déséquilibre de pouvoir, de force et d’échange monétaire ou de toute autre nature.

En réunissant ces éléments, nous pouvons définir l'exploitation sexuelle des mineurs comme suit1

"L’exploitation sexuelle des mineurs est un acte par lequel un individu ou un groupe profite d’un déséquilibre de pouvoir pour utiliser, forcer, contraindre ou tromper un jeune à réaliser une activité de nature sexuelle en ligne ou hors ligne, ou tente de l’amener à réaliser cette activité sexuelle :

  • par une offre ou un échange réel répondant à un besoin non comblé ou à un désir du jeune ;
  • et/ou pour l’avantage de l’auteur ou de la personne facilitant l’activité sexuelle ;
  • indépendamment du consentement ou de qui initie ou sollicite le contact."

Intéressons-nous de plus près à certains éléments soulevés dans cette définition.

Les limites du consentement

Au Canada, l'âge légal pour consentir à des activités sexuelles est de 16 ans, bien qu'il existe des exceptions à la loi qui varient selon l’âge des partenaires. Aussi, le consentement à réaliser une activité sexuelle n'est pas valide lorsqu'une personne se trouve en situation de vulnérabilité, de dépendance, de déséquilibre de pouvoir ou qu'elle a été forcée ou trompée pour réaliser cette activité. Même si la personne mineure initie par elle-même le contact avec une autre personne afin, par exemple, d'échanger un service sexuel, cela est considéré comme de l'exploitation sexuelle. En effet, au Canada, la prostitution de personnes mineures est interdite par la loi. Précisons toutefois que ce ne sont pas les jeunes échangeant des services sexuels qui commettent une infraction, mais bien les personnes qui achètent ces services ou qui tirent avantage de la prostitution des jeunes. 

En savoir plus

Avec le numérique, l'exploitation sexuelle n'a plus de frontières

Dans les dernières décennies, le développement des nouvelles technologies a contribué à l'apparition de nombreux phénomènes contribuant à la victimisation des jeunes (sollicitation en ligne à des fins sexuelles, sextorsion, production de matériel d'exploitation et d'abus sexuel d'enfants, partage non consensuel d'images intimes, etc.). Au Canada, il y a eu une augmentation inquiétante de la cybercriminalité sexuelle envers les enfants et les adolescents. Le taux d’infractions sexuelles en ligne rapportées aux autorités a triplé entre 2014 et 20202

Avec le web et les réseaux sociaux, l'exploitation sexuelle n'a plus de frontières. Tant les jeunes vivant en milieu urbain que ceux vivant en milieu plus éloigné sont à risque de sollicitation. Bien que les situations d'exploitation sexuelle puissent prendre des formes différentes selon qu'elles aient lieu en ligne ou hors ligne, la victimisation en ligne peut elle aussi entraîner des conséquences importantes chez les jeunes. Il est donc important de tenir compte des formes plus contemporaines d'exploitation sexuelle en incluant toute activité de nature sexuelle réalisée par une personne mineure, qu'elle ait lieu en ligne ou en personne.

Ce n'est pas toujours une question d'argent

L'exploitation sexuelle des mineurs, c'est lorsqu'une personne utilise le corps d'un jeune à des fins d’ordre sexuel afin d’en tirer un avantage. Cet avantage peut être économique, mais aussi social (p. ex. : améliorer sa réputation auprès de ses pairs, pouvoir intégrer un groupe ou un réseau qui procure du prestige, améliorer son statut au sein d’un gang de rue, bénéficier d’une protection, pouvoir accéder à un événement privé). Il est important de comprendre que la personne mineure, elle, n'a pas nécessairement à recevoir quelque chose en échange de l'activité sexuelle afin que la situation soit considérée comme étant de l'exploitation sexuelle.

Dans le cas où la personne mineure se voit effectivement offrir quelque chose en échange de l'activité sexuelle, cela peut prendre plusieurs formes. Il peut par exemple s'agir d'un service qui répond à un besoin non comblé du jeune (hébergement, protection, transport, etc.). Il peut aussi s'agir de quelque chose qui répond simplement à un désir du jeune. Cela inclut l'argent, les voyages, les biens matériels (p. ex. : vêtements, bijoux), mais également tout ce qui a de la valeur pour le jeune. 

Pour en apprendre davantage, visionnez cette capsule vidéo créée par le CIUSSS de la Capitale-Nationale. D'autres capsules sont également accessibles via le micro-site Contrer l’exploitation sexuelle, c’est l’affaire de tous.

Voici quelques exemples d'exploitation sexuelle de personnes mineures :

La situation de Victoria

Victoria (16 ans) a fugué de chez elle après une dispute avec sa mère. Son ami Simon lui propose de l’héberger dans son appartement le temps que la situation familiale se règle. Il a actuellement une chambre de libre. Simon offre cette chambre gratuitement à Victoria et lui propose même de payer les repas. Parfois, il insiste pour avoir des relations sexuelles avec Victoria. Celle-ci n'est pas emballée par l'idée. Elle a déjà refusé à quelques reprises, ce qui a contrarié Simon. Comme elle craint de se retrouver à la rue si elle refuse encore les avances de son ami, elle accepte finalement d’avoir des relations sexuelles avec lui.

Pourquoi est-ce de l'exploitation sexuelle ?

Victoria est en situation de vulnérabilité. Elle vit des conflits familiaux, est en fugue et risque de se retrouver à la rue sans l’aide de son ami. Simon tire avantage de la situation pour obtenir des relations sexuelles en échange d'un service (hébergement).

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La situation de James

James (15 ans) a remarqué que son ami Vincent a de nouveaux vêtements de marques populaires, une nouvelle console de jeux vidéos et une montre intelligente. Lorsqu'il le questionne sur ses achats, celui-ci lui explique qu'il connaît une personne sur le web qui lui offre ces cadeaux uniquement pour prendre quelques photos sur lesquelles il se dévêtit. James demande à Vincent s'il pourrait lui présenter cette personne. Il n'y a rien de mal à prendre des photos si on ne voit pas son visage. C’est comme ça qu'il a rencontré Patrick. Depuis, il a enfin pu se procurer la console de jeux qu'il désirait tant.

Pourquoi est-ce de l'exploitation sexuelle ?

Il est notamment interdit d'obtenir et de posséder des images à caractère sexuel d'une personne mineure. Même si James a cherché par lui-même à entrer en contact avec cette personne et qu'il obtient quelque chose en retour, il s'agit d'exploitation sexuelle. 

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La situation de Mikaëlla

Mikaëlla (17 ans) est en couple avec Lucas depuis deux ans. Dernièrement, il a fait part à Mikaëlla qu'il a de graves ennuis. Il reçoit des menaces d'un ami à qui il doit de l'argent. S'il ne le rembourse pas, il craint que son ami s'en prenne à lui. Lucas dit connaître une amie qui pourrait inviter Mikaëlla à une soirée où des hommes sont prêts à payer une fortune en échange d'une relation sexuelle. Selon lui, c'est la seule solution pour gagner rapidement de l'argent. Il dit que si elle l'aime vraiment, elle acceptera. Et ce n'est que du sexe, tout le monde le fait ! Comme Mikaëlla craint pour la sécurité de Lucas, elle accepte à contrecœur de participer à cette soirée.

Pourquoi est-ce de l'exploitation sexuelle ?

Lucas manipule Mikaëlla (en suscitant un sentiment de crainte, en banalisant la sexualité et en profitant de ses sentiments amoureux) pour l'inciter à offrir des services sexuels à d'autres hommes en échange d'argent. Il s’agit d’une situation d’exploitation sexuelle, mais également de proxénétisme.

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La situation de Maxime

Maxime (17 ans) se pose des questions sur son orientation sexuelle. Il ressent de plus en plus d'attirance pour les autres garçons, mais se sent anxieux à l'idée d'en parler avec sa famille et ses amis. Il a toujours été timide et craint que les autres se moquent de lui. Il y a quelques semaines, il a découvert une application qui lui permet de rencontrer des hommes plus âgés afin d'être leur escorte à des soirées et d'échanger des services sexuels. Il n'est pas très à l'aise avec l'idée, mais il apprécie avoir l'occasion de vivre des expériences et d'explorer son orientation sexuelle. 

Pourquoi est-ce de l'exploitation sexuelle ?

Même si Maxime agit de manière volontaire et qu'il tire des avantages de la situation (affection, pouvoir vivre des expériences), il s'agit d'une forme de prostitution. Comme la prostitution de personnes mineures est illégale au Canada, cela est considéré comme de l'exploitation sexuelle. 

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Autres définitions importantes

Pour bien comprendre le phénomène de l’exploitation sexuelle chez les jeunes, il est important d’aussi comprendre les différentes lois qui encadrent et définissent les notions suivantes :

Agression sexuelle

L’agression sexuelle, c'est un geste à caractère sexuel, impliquant ou non un contact physique, qui est commis en l’absence du consentement de la personne visée. Trois éléments permettent plus précisément de dire qu’il s’agit d’une agression sexuelle :

  • Il y a eu l’usage de la « force », qui se manifeste par une manipulation affective, du chantage, des menaces, de la violence physique ou psychologique. La définition de « force » étant très vaste, dès qu’une personne touche une autre personne, cela est considéré comme l’usage de la force.
  • L'agression est de nature sexuelle. Tant les parties du corps touchées que l’intention, les paroles et les gestes de l’agresseur seront pris en compte pour déterminer le caractère sexuel.
  • Il y a eu absence de consentement ou celui-ci n’est pas valide. C’est le cas, par exemple, lorsque la personne n’est pas en mesure d’exprimer son consentement (p. ex. : intoxication à l’alcool ou aux drogues, situation d'handicap), lorsqu’elle est menacée ou forcée à donner son consentement, ou lorsqu’elle n’a pas l’âge de consentir à l’activité sexuelle. 

C’est donc principalement le concept « d’exploitation » qui permet de tracer la frontière entre une agression sexuelle et une situation d'exploitation sexuelle. L’exploitation, c’est le fait d’avoir échangé quelque chose contre l’activité sexuelle (p. ex. : argent, drogues, vêtements, affection, protection ou tout ce qui a de la valeur aux yeux du jeune ou qui répond à un besoin), et/ou d'avoir obtenu un avantage en amenant le jeune à réaliser cette activité sexuelle.

Un jeune a dévoilé une agression sexuelle ? Tout citoyen est dans l’obligation de rapporter cette situation à la Direction de la protection de la jeunesse. Les centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) offrent également des services de soutien gratuits aux jeunes et à leurs proches.

Prostitution

La prostitution consiste à offrir un service sexuel (rapport sexuel, masturbation, relation sexuelle orale, danse-contact, etc.) en échange d’une rétribution. La plupart du temps, les personnes reçoivent de l’argent pour ces services. Dans d’autres situations, elles peuvent plutôt recevoir des drogues ou divers biens et services (hébergement, transport, vêtements, etc.).  Au Canada, il n’est pas illégal d’offrir ses services sexuels contre une rémunération. Ces personnes bénéficient d’une immunité, c’est-à-dire qu’elles ne peuvent pas être poursuivies en justice pour avoir offert leurs propres services sexuels. Ce sont plutôt les personnes qui obtiennent ces services (les clients) qui commettent un délit. 

Au Canada, la prostitution de personnes mineures est proscrite par la loi. Les activités de prostitution réalisées par une personne mineure sont donc considérées comme de l’exploitation sexuelle.

Proxénétisme

Lorsqu’une personne facilite la prostitution d’une autre personne (p. ex. : en la recrutant, en la mettant en contact avec des clients, en créant une petite annonce, en fournissant un lieu de prostitution) ou tire profit de la prostitution d’une autre personne, nous sommes en présence de proxénétisme. Cette personne peut exiger une partie ou la totalité des revenus générés par l'échange des services sexuels. Le terme proxénétisme s’applique peu importe si la personne de qui l’on tire avantage est mineure ou majeure. 

Conséquences de l’exploitation sexuelle

Bien souvent, les jeunes ayant vécu de l'exploitation sexuelle ont aussi subi des violences de diverses natures (physiques, sexuelles, psychologiques). Ils peuvent avoir vécu dans un climat de peur, craint pour leur sécurité et celle de leurs proches, etc. Qu’il soit question d’une situation d’exploitation sexuelle survenue en ligne ou en personne, les conséquences peuvent être importantes et nombreuses. Les besoins des jeunes victimes le sont tout autant. Pour obtenir de l’aide, visitez notre section Trouver une ressource ou Quoi faire en cas de doute ?

Les conséquences de l’exploitation sexuelle peuvent se manifester dans plusieurs sphères de vie :

  • Les comportements et les habitudes de vie : Fugues, conduites délinquantes, difficultés scolaires, etc.
  • La santé physique : Blessures, problèmes de santé sexuelle et reproductive, grossesse non désirée, etc.
  • La santé mentale : Symptômes traumatiques, idées suicidaires, dépression, etc.
  • Les relations sociales : Isolement social, difficultés relationnelles, stigmatisation, discrimination, etc.
  • L'identité et l'estime de soi : Honte, culpabilité, perte de sens, sentiment d'échec, sentiment de ne plus se connaître, etc.

Une websérie pour en savoir plus

La Chaire de recherche du Canada sur le placement et la réadaptation des filles en difficulté, dirigée par Nadine Lanctôt, vous propose la Websérie Les faces cachées de la prostitution. Celle-ci comprend 10 capsules inspirées de recherches réalisées auprès de 125 jeunes femmes confiées aux soins de services de réadaptation, dont les Centres jeunesse. Les capsules abordent des thèmes comme la violence, la souffrance, l'estime de soi, la méfiance et les symptômes traumatiques. Cliquez ici pour accéder aux capsules.
 


Références

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